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Décryptage d’experts : donner un sens à son orientation

BTS, écoles de commerce, classe préparatoire, licence universitaire…, quelle formation choisir après le Bac ? 700 000 élèves de Terminale et étudiants qui souhaitent se réorienter se posent cette question à l’heure où ils doivent, depuis le 17 janvier, formuler leurs vœux sur Parcoursup. Alors que la plateforme gouvernementale offre un panorama de plus de 23 000 formations, comment y voir clair sur son orientation à seulement 17 ou 18 ans ? Comment vivre cette période souvent stressante pour les élèves comme pour leurs parents et prendre la bonne décision ?

À l’occasion d’une interview croisée Sylvain Monnier, directeur du campus de l’Ircom à Lyon et Bertrand Senez, directeur du développement de l’Ircom et spécialiste de l’orientation apportent leurs conseils pour vivre sereinement cette étape jugée parfois cruciale par ceux qui la traversent.

Quels sont les éléments essentiels pour bien vivre Parcoursup ?

Sylvain Monnier, directeur de l'Ircom Lyon

Sylvain Monnier : La question de l’orientation est régulièrement source d’un stress important pour ceux qui y sont confrontés. Lorsqu’on sait que 83 % des utilisateurs de la plateforme abordent cette étape avec un sentiment d’angoisse[1], le premier conseil que l’on peut donner est de prendre du recul et de relativiser. Votre vie future n’est pas déterminée par l’algorithme de Parcoursup ! Il existe une multitude de bifurcations et de réorientations possibles.

En cette période de discernement pour les élèves, il est essentiel qu’ils se renseignent. La récolte d’informations doit se faire au-delà de la plateforme. Beaucoup d’écoles et d’universités proposent des journées portes ouvertes et d’immersions dans leurs cours. La qualité d’une formation s’apprécie beaucoup par l’ambiance de travail, chose qu’on ne peut sentir à la seule lecture de prospectus.


[1] Sénateur LR Jacques Grosperrin, rapporteur de la commission éducation, à l’initiative d’un rapport-bilan sur Parcoursup remis en juin 2023, pour le Journal du Dimanche, le 17/12/2023

Bertrand Senez : Pour beaucoup d’élèves, le sujet de l’orientation survient trop tôt. Nous avons conscience qu’en terminale, ils n’ont pas nécessairement le recul ou la maturité suffisante pour décider de ce qu’ils considèrent comme leur avenir. Or, la connaissance de soi est essentielle pour poser un choix libre. Sans avoir appris à repérer ses aspirations et ses talents, l’élève de Terminale peut facilement se contenter de répondre à des injonctions familiales ou sociales. Bien sûr, il ne s’agit pas de savoir à 18 ans ce que l’on fera plus tard. Rares sont ceux qui à 30 ou 40 ans peuvent dire que ce qu’ils vivent présentement correspond à ce qu’ils imaginaient à 18 ans ! Mais, comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, « pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir mais de le rendre possible[1] ». Pour savoir vers quoi s’orienter, il faut non pas d’abord se demander ce que je ferai demain mais comment parvenir à faire ce que j’aime et qui a du sens pour moi.


[1] Citadelle, Antoine de Saint Exupéry,1948.

Bertrand Senez, directeur du développement de l'Ircom et chercheur au laborem

Comment maintenir le lien parent/enfant ?

Crédit : Laure-Hélène Arnauld
Echange avec une étudiante

Bertrand Senez : Au moment de formuler les vœux sur la plateforme Parcoursup, les parents, comme les professeurs peuvent communiquer leurs inquiétudes. Et c’est compréhensible, il s’agit d’un moment important et à certains égards, crucial. Cela n’aide guère à prendre une décision éclairée… L’idéal est d’avoir institué bien en amont un dialogue qui incite son enfant à faire des relectures de ses expériences, notamment extra-scolaires, à l’aider à nommer ce qu’il a dans le cœur et à identifier ses talents, autant de choses qui l’aideront plus tard à déterminer ce à quoi il doit être attentif pour s’orienter. Si cette habitude n’est pas encore prise, cela peut être l’occasion de la prendre !

Tout ce qui incite l’adolescent à prendre du recul sur sa vie et à mieux se connaitre lui permettra de poser des choix plus libres et lui donnera ainsi d’avancer avec beaucoup plus de force dans ses études.

Sylvain Monnier : L’environnement familial est évidemment crucial pour ces adultes en devenir concernés par les procédures de Parcoursup. Beaucoup de parents s’investissent particulièrement dans l’orientation de leur enfant mais il est important de rappeler que les choix doivent revenir à ces derniers. Une relation de confiance doit exister dans le cadre familial pour que la discussion soit franche et libérée. Les parents sont là pour accompagner dans les moments de stress et apporter leurs conseils sans nuire à la responsabilisation des candidats. Dans cet échange, une place doit être laissée à la parole des candidats mais aussi à celle de leurs parents. La réflexion doit partir des désirs de l’élève mais il est important que ses proches l’aident à questionner ses souhaits à la lumière de ce qu’ils connaissent de lui et dont il n’a pas nécessairement conscience. Par ailleurs, les parents doivent, avec beaucoup de délicatesse, aider l’élève à confronter son projet à la réalité du secteur professionnel vers lequel il s’oriente.

Quels sont les critères auxquels il faut être attentifs au moment de s’orienter ?

Bertrand Senez : De nombreuses recherches en psychologie de l’orientation relèvent l’importance de la congruence qui désigne l’ajustement d’une personne à une activité professionnelle. Il me semble que la congruence s’articule autour de 3 axes :

  • L’environnement de travail : dans quel environnement j’ai besoin de travailler pour me sentir bien ? derrière un ordinateur en petit effectif, sur le terrain, en autonomie ou en équipe…
  • La nature de l’activité : Qu’est-ce que je fais avec facilité et qui me réjouit de faire ? diriger, concevoir, rechercher, accompagner, contrôler, réaliser, servir, entreprendre, créer…
  • La finalité : à quoi je souhaite contribuer par mon travail ? Au service de quoi je souhaite travailler ?

En articulant ces trois axes le jeune peut répondre de manière pertinente aux enjeux de son avenir en ciblant les métiers dans lequel il trouvera son épanouissement et par lesquels son travail trouvera tout son sens et répondra aux besoins du monde. Les formations envisagées ne sont que des moyens pour rendre tout cela possible.

Sylvain Monnier : Un autre point auquel l’élève de terminale doit être attentif est de ne pas avoir une vision trop utilitariste de ses études. Il serait dommage que celles-ci aient pour seul objectif l’obtention d’un diplôme voire d’une profession. La vie étudiante doit aussi être un moment de croissance et structuration sur le plan humain et particulièrement sur le plan intellectuel. Il existe des écoles qui permettent aux étudiants d’apprendre à se connaitre et à mieux appréhender le monde dans lequel ils évoluent. Des formations généralistes comme la licence dispensée à l’Ircom, mettent l’accent sur la culture générale et l’expérience, personnelle et professionnelle. Les jeunes peuvent y approfondir leur projet et murir leur choix d’orientation. Grâce à l’acquisition d’un solide bagage théorique et pratique, ils ont la possibilité d’intégrer une multitude de formations auxquelles ils ne pensaient pas forcément pouvoir prétendre en terminale.

Orientation après la licence de l’Ircom

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